Cadre de mes travaux de thèse

Algèbres de Lie semi-simples

  Les algèbres de Lie ont été introduites vers la fin du XIXème siècle afin d'étudier certains problèmes de nature géométrique. Dans un soucis de classification de ces objets, les algèbres de Lie semi-simples se sont vues conférer un rôle important. C'est la classe d'algèbres de Lie à laquelle je m'interesse. L'exemple le plus basique est presque donné par 𝖌=𝖌ln, l'ensemble des matrices de taille n muni du crochet de Lie [A,B]=A.B-B.A. Une telle algèbre est, en fait, dite réductive puisque seule [𝖌,𝖌] est semi-simple.

Algèbres de Lie symétriques

  On dispose d'une classification explicite des algèbres de Lie semi-simples complexes (An, Bn, Cn, Dn, E6, E7, E8, F4 et G2). Dans le cas réel, la classification s'appuie fortement sur la classification complexe. Plus précisément, si 𝖌 est une algèbre de Lie semi-simple réelle, elle dispose d'une involution dite de Cartan que nous noterons θ. Notant 𝖐 et 𝖕 les sous-espaces propres respectivement associés aux valeurs propres +1 et -1 de θ, on obtient une décomposition (de Cartan) 𝖌=𝖐+𝖕 en parties dites respectivement compactes et non compactes. Cette dénomination est reliée à une décomposition analogue pour les groupes algébriques (par exemple la décomposition polaire lorsque 𝖌=𝖌ln)

Complexifiant ces notions, on obtient une paire (𝖌) (associée à une décomposition 𝖌=𝖐+𝖕). On remarque que 𝖐 est une sous-algèbre de Lie (réductive) de 𝖌 tandis que 𝖕 est un ad 𝖐-module où ad(x)=[x,.] désigne l'action adjointe. Une paire (𝖌,θ) (où 𝖌 est une algèbre de Lie complexe et θ une involution de 𝖌) est appelée algèbre de Lie symétrique (complexe).

La méthode décrite ci dessus associe donc à toute algèbre de Lie semi-simple réelle une algèbre de Lie symétrique semi-simple complexe. On peut montrer que ceci établi une correspondance bijective. Cette correspondance entre les algèbres de Lie symétriques complexes et les algèbres de Lie réelles est approfondie par la correspondance dite de Kostant-Sekiguchi. Cette dernière met en bijection l'ensemble des orbites nilpotentes réelles de 𝖌 et l'ensemble des orbites nilpotentes complexes de 𝖕.

Un cas particulier d'algèbre de Lie symétrique est celui où 𝖌 est isomorphe à la somme directe de deux copies 𝖌0 et 𝖌1 d'une même algèbre de Lie 𝖌', et où θ(𝖌i)=𝖌1-i, i=0,1. L'algèbre de Lie 𝖐={x+θ(x)| x∈ 𝖌1} est alors isomorphe à 𝖌' et le ad 𝖐-module 𝖕={x-θ(x)| x∈ 𝖌1} est isomorphe au ad 𝖌'-module 𝖌'. Dans ce sens, les algèbres de Lie symétriques constituent une généralisation des algèbres de Lie. Ainsi, il n'est pas étonnant de trouver que nombres de notions des algèbres de Lie (e.g. sous-algèbres de Cartan, systèmes de racines, diagrammes de Dynkin, 𝖘l2-triplets,...), ont un analogue symétrique (e.g. sous-espaces de Cartan, systèmes de racines restreints, diagrammes de Satake, 𝖘l2-triplets normaux,...).

Géométrie dans les algèbres de Lie

   Un second niveau de structure des algèbre de Lie (semi-simples complexe) joue un rôle important. Il sagit de considérer 𝖌 comme une G-variété où G est le groupe algébrique adjoint de 𝖌 opérant via l'action adjointe Ad sur 𝖌. Il s'avère alors utile d'étudier ceci dans le cadre de la géométrie algébrique.

Par exemple, les notions d'éléments semi-simples et nilpotents de 𝖌 ont une interprétation géométrique. Les (G-)orbites semi-simples coïncident avec les orbites fermées, tandis que les orbites nilpotentes sont les orbites dont la fermeture contient 0. Dans cette situation encore, de nombreuses notions ont été généralisées aux algèbres de Lie symétriques. On peut définir le sous-groupe connexe K de G d'algèbre de Lie 𝖐 et on peut alors voir 𝖕 comme une Ad K-variété.

Les propriétés géométriques de certaines variétés issues des algèbres de Lie ont alors pu être étudiées. D'un point de vue général, mon travail consiste à généraliser et comprendre les propriétés de variétés analogues dans les algèbres de Lie symétriques.

Exemple 1: la variété commutante

  Un premier exemple est donné par la variété commutante 𝕮(𝖌):={(x,y)∈𝖌×𝖌| [x,y]=0}. Cette variété est irréductible (Richardson, 1979). De façon analogue, il a été récemment prouvé (Premet 2003) que la variété commutante nilpotente 𝕮nil(𝖌)=𝕮(𝖌)∩𝓝×𝓝 est équidimensionelle et que ses composantes irréductibles sont indexées par des orbites nilpotentes dites distinguées.

Concernant les analogues dans le cadre symétrique, on peut citer l'étude de la variété commutante symétrique 𝕮(𝖕)=𝕮 (𝖌)∩(𝖕×𝖕). Elle n'est pas irréductible ni même équidimensionelle dans le cas général. Je me suis interessé à la variété commutante nilpotente symétrique 𝕮nil(𝖕)=𝕮nil(𝖌)∩(𝖕×𝖕). J'ai obtenu dans 15 cas sur 20 (de la classification des algèbres de Lie symétriques) la propriété suivante: 𝕮nil(𝖕) est équidimensionelle.

Exemple 2: Les nappes

   Les nappes (ou G-nappes) sont un autre exemple de variétés étudiées. Ce sont les composantes irréductibles des ensembles de la forme 𝖌(m):={x∈𝖌| dim G.x=m}; m∈ ℕ. Ces nappes apparaissent dans plusieurs problèmes et la connaissance de leur structure permet de transférer certaines propriétés des éléments semi-simples aux éléments nilpotents. Par exemple, un point crucial de la preuve d'irréductibilité par Richardson s'interprète naturellement en terme de nappes.

Une partie de l'étude des nappes s'est faite à travers un objet appelé tranche de Slodowy. Si (e,h,f) est un 𝖘l2-triplet tel que e appartienne à une nappe S, une tranche de Slodowy de S est donnée par e+X:=S∩(e+𝖌f). En particulier, on peut montrer que S=G.(e+X) et qu'un quotient géométrique de S est donné par un quotient de X par un groupe fini.

Les K-nappes sont un bon analogue symétrique des nappes. On les définit comme étant les composantes irréductibles d'ensembles de la forme 𝖕(m):={x∈ 𝖕| dim K.x=m}, m∈ℕ. L'étude que j'en ai faite a permis de montrer que la paramétrisation par la tranche de Slodowy gardait quelques bonnes propriétés dans le cas 𝖌=𝖌ln. Ainsi, il a été possible de voir que les K-nappes sont les éléments réguliers de la fermeture des ensembles de la forme K.(e+X∩𝖕) lorsque (e,h,f) est un 𝖘l2-triplet normal.



- Cool non? - Michaël Bulois         Last update: 17 December 2011 - nice website, isn't it?-